Quelle gratuité dans un monde marchand ?

À l’heure du numérique « tout ce qui était libre et gratuit depuis l’époque de, disons, Noé devient du jour au lendemain payant » énonce le pamphlétaire Lucien X Polastron (La grande numérisation, Y a-t-il une pensée après le papier ? Denoël, 2006). Dans ce contexte, les bibliothèques peuvent-elles encore aujourd’hui satisfaire à l’idéal de la lecture publique : la gratuité ? Gratuité qui a été et demeure le cheval de bataille de l’Association des bibliothécaires de France depuis le début du XXe siècle. De nouveaux modèles de production et de diffusion de la culture sont nés avec la technologie du numérique en réseau. À l’origine, l’invention des outils du web procédait de ce même idéal démocratique de la culture gratuitement accessible à tous ; en ce sens idéalement Internet et bibliothèque se rejoignaient. Toutefois, des enjeux économiques et commerciaux ont inversé le balancier et désormais la possibilité de contrôler techniquement tous les usages est mise en oeuvre de manière systématique par les titulaires des droits d’auteur et copyright. Dès lors, quels sont les nouveaux modèles de la gratuité ? Permettent-ils de garantir aux usagers des bibliothèques et aux internautes un accès libre et gratuit aux collections et services culturels ? Quelles sont les perspectives d’évolution ?